Santa Barbara, Acte 2

Chapitre 31 : Ramener le passé au présent...

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Et avec la participation exceptionnelle
de Patrick Duffy
dans le rôle de Bobby Ewing

Faudrait pouvoir jeter
Tous les mannequins d'osier
Du haut d'un grand pont
Ces fantômes oubliés
Ces ombres du passé
Qui nous espionnent.

Faudrait pouvoir brûler
Les visages adorés
De notre enfance
Marcher d'un pas léger
Vers le soleil qui vient
En insouciance

 

Hôpital de Santa Barbara.

Le vigile passa un oeil par la porte de la chambre de Brandon : tout de suite, il trouva suspect que la femme de ménage soit assise sur le lit du petit Brandon Capwell. Afin d'assurer la sécurité du petit garçon et d'obéir aux ordres, il jeta un bref coup d'oeil sur la photo de Gina que lui avait remise C.C. Capwell. Nul doute, il s'agissait bien de Gina DeMott, la mère adoptive du petit garçon.

Aussitôt, il se rua dans la chambre, empoigna Gina et lui fit quitter la pièce par la force, malgré hurlements et menaces. Arrivés devant la porte d'entrée de l'hôpital, il la poussa dehors : «Suite à une injonction du tribunal, vous n'avez pas le droit de vous retrouver aux côtés de Brandon Capwell.»

- Mais, c'est mon fils. Je vous jure que je vous le ferai payer. On voit que vous ne savez pas qui je suis...

Gina menaça encore un long moment le pauvre vigile qui ne faisait qu'obéir aux ordres du puissant C.C. Capwell. Comme à chaque fois qu'on s'en prenait à son amour de mère, Gina sentait une puissante envie de haine et de vengeance qui lui montait à la gorge. Channing ne perdait rien pour attendre.

- Je l'aurai ma revanche... Personne, oh non, personne ne me prendra mon petit garçon. Vous pouvez aller lui dire : qu'il fasse très attention à Gina... Je lui prendrai tout ce qui lui tient à coeur.

C'est à ce moment que Mason quitta la chambre de Santana Andrade, qui avait fini par s'endormir telle une enfant dans les bras de Rosa, sa mère. Reconnaissant les cris de Gina, Mason se rua vers l'entrée principale de l'hôpital, où cette dernière hurlait après médecins et infirmières qui passaient par là. Comme à son habitude, Gina n'avait vraiment que faire de se ridiculiser. Et lorsqu'elle vit Mason, elle se précipita vers lui, s'abandonnant littéralement dans ses bras. Rapidement, elle lui expliqua la situation et Mason, connaissant parfaitement les agissements de son père, savait que Gina lui racontait la vérité.

- Mason, mon ami, j'ai besoin de vous pour voir Brandon. Il est tout seul.

Mason s'avança vers le vigile et essaya de débloquer la situation.

- Monsieur, votre père avait prévu que vous interviendriez. C'est pourquoi, en son absence, vous n'avez pas le droit vous non plus d'accéder à la chambre de Brandon Capwell. Je suis désolé, mais ce sont les ordres que j'ai reçus.

Mason s'empressa de lire le document rédigé par le juge David Raymond. Il était des plus clairs : Gina et Santana ne pouvaient plus s'approcher de Brandon, la garde de Brandon et de Channing Capwell III était temporairement remise à C.C. Capwell et, bien sûr, Mason ne pouvait pas non plus s'approcher d'aucun des deux fils de Gina.

Mason s'écarta du vigile et repris Gina dans ses bras pour la consoler. Gina, profondément blessée dans sa chair de mère et frustrée d'être ainsi dépouillée, concentra toutes ses forces sur Mason : elle lui confia sa colère, sa haine de Channing, sa soif éperdue de vengeance, ses remords de ne pas l'avoir abattu lorsqu'elle en avait eu la possibilité, et ses regrets de l'avoir laissé s'échapper lui, Mason Capwell.

A quelques pas de là, Julia, qui était venue retrouver Mason pour tenter de s'expliquer avec lui, assista à toute la scène de ce qu'elle cru être les retrouvailles entre Gina et Mason. Le souvenir d'une autre trahison lui revint en mémoire. Et en dépit de tout ce qu'elle croyait, la blessure était encore là. A ses côtés, Bobby Ewing lui accorda quelques secondes, avant de la prendre par les épaules.

- Venez, rester là ne servirait à rien. Je vais vous amener loin d'ici et boire une bonne bière, je crois que nous en avons besoin.

 

Jardin japonais de Santa Barbara.

Le petit groupe constitué de Marcello Armonti, de Channing Capwell, de Sophia Armonti Capwell et de Lisa / Eden Capwell s'écarta des invités. Ils gagnèrent un ponton de bois et c'est au milieu du lac, caché par des arbres centenaires, que Marcello leur ordonna de s'arrêter.

- Je vous avais promis la dernière fois que je reviendrais. Et cette fois-ci, il n'y aura personne pour vous sauver. Vous allez enfin affronter ma vengeance....

- Marcello, je t'en prie !

- Arrête,  Sophia, tu ne vois pas qu'il attend que cela ? Que nous le supplions ? Mais cela n'arrivera pas.

Le regard de Sophia quitta un moment Eden pour s'arrêter sur Channing. Et pour la première fois, elle le découvrait tel qu'il pouvait se montrer dans le monde des affaires : froid. Froid et sans pitié.

Tout autour d'eux, l'air se chargeait en électricité. Seule Eden / Lisa semblait ne pas être ni personnellement, ni émotionnellement,  impliquée. Son regard restait vide de vie, absente à l'étrangeté de la scène.

Lentement, Marcello la positionna entre lui et le duo Channing / Sophia.

- Nous voilà arrivés au point de non retour. Ce n'est plus l'heure des choix, car ce temps-là est fini. Channing, il est temps pour toi de payer pour les tiens. Pour tout le mal fait..

- Marcello, après toutes ces années, je ne suis pas certaine que la vengeance que tu as choisie puisse t'apporter la paix.

- La paix, Sophia, mais je n'en est que faire ! C'est bien au-delà de cela. Lorsque tu as commencé à te souvenir de ta vie, avant l'Italie, tu étais prête à tout endurer pour retrouver tes enfants, et ce en dépit de toutes mes mises en garde... Pour moi et ma soeur, il en est de même. Nous avons besoin de cette vengeance...

- Et combien veux-tu, Marcello, pour satisfaire tes envies de vengeance ?

- Combien ?

De ses yeux d'acier, Marcello pénétra l'âme et le corps de Channing Capwell. Il essaya une fraction de seconde d'aller plus en avant, au plus profond de l'être de cet homme, mais une épaisse barrière l'empêchait de passer. Channing restait de marbre, impénétrable à la moindre émotion.

- Combien... Je ne sais pas, Channing, à combien est-ce que tu estimes sa vie, à elle...

Sophia recula, le coeur en peine. Channing glissa un bref regard vers sa fille, avant de revenir sur Marcello.

- Combien, Marcello ? Ta proposition sera la mienne.

- Ah Ahhh Aaaahhh... Channing, Channing.... Il faudra que tu comprennes que ton argent ne peut pas tout acheter.

- Nous avons tous un prix. Alors ?...

- Et toi, Channing, quel est le tien ?

Marcello marqua une pause, figeant Sophia du regard. Sophia, le regard embrouillé par les larmes qui commençaient à naître, revivait des moments de son passé. Et bien qu'elle n'arrivait pas à le formuler concrètement, une nouvelle conscience se matérialisait dans son esprit.

- Quel est le tien, Channing... Puisque te prendre un fils, cela n'a pas été suffisant.

Et alors que les deux hommes se défiaient, Sophia plongea son regard dans celui d'Eden et, imperceptiblement, le temps s'arrêta.  C'était comme si elles se retrouvaient quelques mois plus tôt dans le bureau Capwell, Eden portait tel un étendard la colère de Channing Junior. Sophia, quant à elle, pour la seconde fois, réalisait qu'en dépit de tout son amour pour chacun de ses enfants, cela n'était pas suffisant.

 

Dans un autre temps et dans un autre lieu, une conscience se matérialisa. Channing Junior ne se sentait pas prêt à disparaître réellement et définitivement. Marcello Armonti l'avait fait renaître sous une autre forme de vie, et bien que cela ne soit pas vraiment vivre, ce semblant de vie le comblait.

Dans cet état de conscience qui lui était propre, il se retrouva face à face avec son autre lui, Brick Wallace, et face à son fils. Il les dominait tous deux de toute sa force. Même dans ce monde-là, il restait l'héritier Capwell. Sa suffisance était telle qu'ils ne pouvaient que plier devant sa volonté.

 

Eden / Lisa, soudain, dirigea le canon du revolver sur Channing Capwell, et lança d'une voix toute mécanique :

- Il est temps de terminer ce qui a commencé un 31 juillet.

- Eden...

Soudain, Sophia reprit conscience.

- Laisse, Channing. Ce n'est pas vraiment elle. Elle est sous son contrôle, comme je l'ai été durant de longues années.

Tous les regards convergèrent sur Eden / Lisa.

 

Channing Junior ferma ses oreilles; il était las d'entendre toujours les mêmes plaintes, les mêmes suppliques. Brick et Brandon le fatiguaient. Ils n'avaient que le pardon à la bouche. Ce n'était pas cela vivre pour lui. Ce n'était pas l'éducation qu'il avait reçue. On n'avait eu de cesse à lui apprendre d'attendre le bon moment, avant de refermer les griffes et de briser celle ou celui contre lequel il se battait... Non, définitivement ni Brick, ni Brandon n'étaient de sa trempe.

 

Marcello s'écarta d'Eden / Lisa, après lui avoir glissé quelques mots à l'oreille. Depuis qu'elle les maintenait en joue, elle n'avait pas montré la moindre expression sur son visage. Elle restait les traits littéralement figés, agissant de façon mécanique. Toutefois, de temps à autres, elle se laissait à observer Sophia et une question se dessinait dans les méandres de son esprit endormi : pourquoi avait-elle la sensation d'avoir déjà vécu cette scène ?

Soudain, Marcello reprit le plein contrôle de la conversation.

- Channing, il est temps à présent pour toi de te préparer à passer de l'autre côté !

- Marcello, tu as déjà essayé et je te rappelle que ta vengeance n'a pas marché...

- Suffit...

Marcello regarda autour de lui; tout était parfait, personne ne viendrait les sauver, même si de l'autre côté des arbres, la fête Armonti's battait son plein.

- Channing, il y a des années, nos chemins se sont déjà croisés. Je ne sais pour quelles raisons, mais mes parents ont choisi de te protéger.... Alors qu'ils auraient pu te dénoncer... Et en échange de ta vie, tu as protégé ton frère et ton ami. Ils m'ont pris ma soeur, ma petite soeur, pour s'en servir tel un jouet et ensuite la vendre aux allemands. Tu étais au courant. Mais tu n'as rien fait.

- Mais...

- Pas de mais, Channing. Il ne peut y avoir d'excuse pour ce crime. Tu avais le choix à l'époque, et tu as choisi de défendre ta famille, tes amis. C'est pourquoi, je t'ai reconnu coupable. Coupable. Coupable... Et je viens aujourd'hui exécuter ma sentence.

- Cela n'a pas de sens...

Channing, tout en parlant, s'approcha de Marcello. Et avant qu'il ait pu faire un second pas, Eden  / Lisa se glissa entre les deux hommes. Channing ne la regardait pas. Pour l'heure, il ne voulait pas songer qu'elle était sa petite Eden, sa petite fille chérie. Tout son esprit se concentrait sur Marcello et sa folie.

- Il y a des années de cela, ma route a croisé celle de votre fils. Channing Junior et moi sommes devenus des amis en secret. Dès lors, je n'ai eu de cesse de lui montrer votre véritable personnalité. Et ma foi, il a bien fini par me croire. Tout a basculé, car je lui ai prouvé que sa mère adorée n'était ni morte ni celle qu'il croyait, et qu'elle les avait abandonnés. Ce jour là, j'ai senti que je le tenais sous mon contrôle. Puis un jour, lorsque j'ai su et que je lui ai révélé le secret de sa naissance, secret que Sophia m'a confié sous hypnose, Channing Junior a complètement adhéré à mon plan de vengeance. Il voulait en faire partie. Quel qu'en soit le prix.

Face à lui, le visage de Sophia se décomposait. Le passé, son passé, était redevenu sien. Le passé était revenu au présent. Plus aucune barrière ne l'empêchait d'accéder à la vérité. Ses jambes vacillèrent. Pendant si longtemps, elle avait porté le fardeau de la culpabilité. Pendant des années, il l'avait obligée à vivre avec ce poids. Elle chercha à s'accrocher au bras de Channing, quand Eden / Lisa prit la parole.

- Tu nous as tous abandonnés pour une autre vie. Tu ne voulais pas de nous, tu préférais te rouler dans la luxure avec ton amant... Pour cela tu es coupable. Coupable... Et tu vas devoir payer le prix...

- Non, ma petite fille. Je ne vous ai pas abandonnés... Il m'a manipulée... Lorsque j'ai basculé par-dessus bord du voilier de Lionel, Marcello m'a recueillie et il a fait en sorte que je ne me souvienne pas de ma famille... Je suis devenue un robot pour lui. Tout comme toi, ma petite fille...

- Cela ne sert à rien, Sophia...

 

De l'autre côté d'une barrière invisible, Channing Junior jubilait. Il prenait plaisir à vivre la scène qui se déroulait dans le parc japonais de la ville. Tous ses sens étaient en éveil. A nouveau, il retrouvait l'étrange sensation d'être vivant. Non, Marcello ne lui avait pas menti. La voie sur laquelle il l'avait conduit était la bonne. Passé, présent et futur, tout était lié. Il sentait au fond de lui des picotements, des étincelles de vie : oui, le passé revenait au présent. D'ailleurs, autour de lui, Brick et Brandon ressentaient les mêmes émois. Dans leur sommeil, les deux corps qui renfermaient une part de vie de Channing Junior glissaient lentement vers une autre réalité.

 

- Cela ne sert à rien, Sophia. Elle a choisi mon camp. Tout comme Channing Junior a choisi le chemin que j'avais tracé pour lui. Ce soir de juillet, lorsque tu es revenue à Santa Barbara pour affronter Lionel. Channing et moi avions tout organisé. De la liste d'invités au lieu du drame. Tout avait été minutieusement planifié. Au cours de nos séances, j'allais à chaque fois un peu plus loin dans ton subconscient, pour y implanter mon raisonnement. Il fallait pour que cela fonctionne que tu sois suffisamment conditionnée pour que tu ailles jusqu'au bout. Il ne devait plus subsister le moindre doute dans ton esprit : il fallait impérativement que tu tires sur Channing Junior. Ah Ah Ah Ahhh... Ce soir-là, je vous ai pris votre bien le plus précieux... Channing, tu entends, je t'ai pris ton héritier. Ce fils que tu aimais tant et qui n'était ni plus ni moins qu'un bâtard...

Les yeux de Marcello irradiaient. La haine déformait ses traits.

- Ce soir-là, j'ai posé la première pierre de ma vengeance. Et aujourd'hui, après vous avoir volé un fils, je vais vous prendre votre fille adorée... Celle qui, pendant des années, fut le souvenir vivant de sa mère, et celle qui est devenue, Channing, ta future héritière...

- Non, Marcello, je t'en prie, pas cela...

 

Alors qu'il observait sa soeur, Channing Junior fut touché par une présence. Un enfant se tenait immobile à ses côtés. Il tourna son être vers lui. Brandon, son propre fils, le dévisageait. Le futur ramené au présent prenait vie dans le futur. Channing Junior ne fut pas envahi par un doute, mais par une certitude : le plan de Marcello ne devait pas aller jusqu'à son terme. Soudain, Channing Junior prit peur. Non pas pour ses frères et soeurs, il n'en avait vraiment que faire. Il prit peur pour sa propre survie. Etrangement, et il venait juste de le comprendre, Brick et Brandon renfermaient dans leur être la force nécessaire pour le faire vivre encore. Et si Marcello menait sa vengeance à son terme, alors il disparaîtrait dans l'oubli. Il n'y aurait plus d'avenir pour lui...

Brandon restait toujours immobile à le dévisager. Père et fils s'observaient. Il y avait de la crainte d'un côté, et de l'espoir de l'autre. Une fraction de seconde, Channing Junior ferma les yeux.

 

Durant ce bref laps de temps, la pression de la main d'Eden / Lisa qui tenait l'arme, se relâcha; un doute, peut-être, s'immisçait en elle.

Sophia recula en titubant : tous les nuages sur son passé venaient de se dissiper. D'Anchorage à l'Italie, toutes ces étapes clés de sa vie lui revenaient en mémoire. Marcello l'avait transformée en meurtrière; elle n'avait pas eu d'autres choix que de suivre le chemin que Marcello traçait inexorablement pour elle. Les mots lui manquèrent dans un premier temps.

- Tu as fait de moi la meurtrière de mon fils... Tu m'as programmée... tel un robot... Tu... Je faisais partie de ton plan.

Face à elle, Marcello souriait.

- Il fallait que je venge ma petite soeur. Elle ne pouvait pas avoir tant souffert pour rien. Les Capwell avaient brisé ma famille; en retour je devais briser la leur... Au début, sincèrement, je n'avais rien prévu, mais quand je t'ai sauvé ce 3 mai, le plan m'est apparu... Je n'avais pas d'autres choix que de prendre aux Capwell ce qu'ils avaient de plus précieux. Et l'héritier, le fils chéri, me semblait être suffisant à l'époque... Aujourd'hui, je sais que je me suis trompé. Ma soeur et moi, nous ne pourrons trouver la paix que lorsque tous les enfants Capwell auront péri...

- Tu es fou, Marcello... Complètement...

- Détrompe-toi, Channing. Toute ta famille est à ma merci... Allez, qu'on en finisse à présent !

Marcello fixa un moment Eden / Lisa et celle-ci semblait le comprendre. Elle raffermit sa pression sur la crosse de l'arme, puis elle pointa ses yeux sur le visage de Sophia. Il ne transparaissait aucune émotion. Sophia ne pouvait détacher son regard de sa fille, elle essayait de toutes ses forces de lui transmettre la force de son amour. Et Eden / Lisa restait fermée. Comme Sophia leva une main vers sa fille, cette dernière marqua un geste de recul, comme si elle ne voulait pas être souillée par ce contact.

Sophia laissa alors s'évanouir dans la nature tous ses espoirs : elle se résigna à accepter à payer le prix; après tout, n'était-elle pas en partie coupable pour avoir tué son fils ?

Soudain, à proximité d'eux, un coup de feu retentit. Tous les regards se portèrent vers le centre du parc, là où se tenait la grande fête Armonti. Channing en profita pour essayer de prendre l'arme à Eden / Lisa, mais avant qu'il n'ait pu la prendre, Marcello se rua sur lui et le frappa au visage. C.C. Capwell se retrouva au pied de sa fille, le nez en sang.

- N'y songe même pas...

Channing ne voulait rien tenter qui puisse blesser Eden ou Sophia.

Des cris se rapprochaient à présent. Marcello se raidit, il lui fallait agir vite s'il voulait en finir avec sa vengeance. C'est alors que marchant au milieu du lac, de l'eau jusqu'aux genoux, Venise Armonti venait vers eux. Contre tout attente, elle avait elle aussi décidé de passer à l'action.

- Marcello tu m'as trahie, mais moi aussi j'ai ma vengeance... Et je ne peux pas te laisser te jouer de moi.

La colère déformait le visage et la voix de Marcello.

- Retourne là-bas, Venise. Cela ne te regarde pas !

- Si. Tant que l'autre porte le diadème Armonti, cela me regarde.

- Venise !

Venise réussit à monter sur le ponton de bois, et tous les cinq se dévisageaient. Eden / Lisa pointait une arme sur Sophia, Venise menaçait d'une arme Eden et Marcello, et Channing cherchait le meilleur moyen pour que les siens s'en sortent vivants.

- Je ne m'attendais pas à cela de ta part, Marcello. J'avais confiance en toi.

- Venise...

- Non, arrête. Donne-moi le diadème. Le reste, je m'en moque.

Au lointain, on entendait les appels de T.J. qui recherchait Venise. Tout le monde avait conscience qu'il leur fallait agir au plus vite. Channing, lentement, se plaça entre Eden / Lisa et Sophia. Marcello ne quittait pas du regard Channing et Venise, certain que l'un des deux allait passer à l'action. Il choisit de planter ses yeux bleus dans ceux de Venise; il devait la ramener à la raison.

 

Soudain, les forces de Channing Junior le quittèrent. Il perdait toute volonté, toute détermination. Brandon venait de glisser sa main dans la sienne. Channing se sentit anéanti par ce geste d'affection.

 

Eden / Lisa se mit à trembler. Et Channing, voyant qu'elle allait s'effondrer, tenta de l'attirer à lui, mais Marcello, devinant son geste, sauta littéralement à la gorge de Channing. Venise, retrouvant toute ses facultés et guidée par son instinct de vengeance, se rua sur Eden / Lisa pour lui reprendre le diadème. Dans la bataille entre les deux femmes, un coup de feu partit, heureusement sans blesser personne. Et l'arme d'Eden / Lisa finit par glisser sur le sol. Dans leur lutte, elles tombèrent du ponton de bois et, toujours emmêlées l'une à l'autre, elles se débattaient à présent dans l'eau du lac.

Sur le ponton, les coups entre Marcello et Channing pleuvaient. Alors que Marcello s'était montré très affaibli par son attaque cardiaque, il révélait là qu'il n'en était rien. La lutte était serrée entre Channing et lui. Seule Sophia restait immobile. Bien sûr, elle voulait crier, bouger, aider Eden, mais elle était comme paralysée de l'intérieur. L'emprise de Marcello sur elle était totale.

Dans l'eau, Eden / Lisa et Venise continuaient de se battre. Un moment, Eden sembla prendre le dessus, lorsqu'elle réussit à maintenir Venise sous l'eau durant de longues secondes. Mais Venise, qui semblait battu, réussi à retourner la situation à son avantage.

Channing, lui, réussit à se remettre solidement sur ses pieds et, lorsque Marcello vint vers lui, il réussit à le repousser de toutes ses forces. Marcello chuta lourdement dans l'eau. Et Channing comprit que c'était là son erreur. Marcello, qui se trouvait très proche d'Eden / Lisa, l'empoigna violemment par les cheveux.

- Ce n'est pas grave, je sais m'adapter.

Marcello, fou de colère, attrapa Eden par la tête et lui maintint la tête sous l'eau.

- Channing, tu fais le moindre geste et elle meurt.

Pétrifié, Channing, cette fois-ci, ne pouvait rien faire.

- Quel est ton prix Marcello ? Je te donnerai tout si elle vie. Venise, si tu la sauves, je te donne tout ce que tu veux.

- Rien ne pourra la sauver. Rien n'a pu sauver Channing Junior.

L'eau rentrait avec violence dans les poumons d'Eden. Channing pouvait lui aussi en sentir les effets. Dans sa main, la main de Brandon se raidit. Tous vivaient les souffrances d'Eden.

 

La porte du bureau de Channing, à la villa Capwell, se referma. Un jeune homme se retourna, le sourire aux lèvres. Il savait que pour la première fois depuis de longues années, il allait revoir le visage de sa mère. Elle, assise sur le fauteuil de cuir, attendait que son ancien amant entre dans la pièce. Son esprit était comme pénétré par la pointe d'une perceuse. Pour échapper à cette horrible souffrance, elle n'avait pas d'autres choix que d'écouter la douce voix qui résonnait dans ses oreilles. Pour le moment, la voix lui murmurait un air d'opéra en italien. La mélodie conjuguée au timbre de la voix détournaient la douleur qui violait les portes de son esprit. D'agréables souvenirs lui revenaient en mémoire. La paix, la sérénité, l'habitaient. Et lorsque la voix lui murmura qu'elle devait se retourner et tirer sur l'homme qui se tiendrait en face d'elle, car il était à l'origine de toutes ses souffrances, Sophia la crue. Sophia la crue, car au fond d'elle, on lui avait intimement glissé la certitude que la voix avait raison, que si cet homme n'était plus, ses souffrances aussi ne seraient plus.

 

Le passé ramené au présent libérait lentement Sophia de l'emprise de Marcello. Le passé ne pouvait se répéter à l'infini.

- Tu m'a pris mon fils. Tu m'as pris l'amour de mes enfants, mais en dépit de toutes ces années de solitude, en dépit de tout le mal que je leur ai fait, ils ont su trouver la force de me pardonner. Parce qu'ils m'aiment. Ils m'aiment, Marcello, et contre cela, tu ne peux rien !

Sophia dévisageait Marcello. Elle trouvait au fond d'elle la force de résister à ces yeux bleus pénétrant qui cherchaient à contrôler son âme. Et si Sophia parvenait à résister à Marcello Armonti, c'est qu'au fond d'elle, elle sentait Brandon et Brick qui se joignaient à elle. Et, Sophia en était certaine, Channing Junior se joignait aussi à eux. Sophia ferma les yeux un instant : Channing Junior et elle étaient en train de faire la paix.

Sûre de son choix, Sophia fixa le visage d'Eden : il lui renvoyait certes la preuve vivante de toutes les souffrances qui habitaient chacun des membres Capwell, mais aussi la preuve de l'amour qui unissaient ces mêmes membres entre eux. La part d'Eden n'était pas encore vaincue, elle vivait toujours sous la froideur de Lisa.

Sophia se pencha lentement; chacun de ses gestes s'effectuaient au ralenti. Elle se pencha et ramassa l'arme et la pointa sur Marcello.

- Tire sur moi, si tu l'oses !

Venise s'arrêta de bouger. Ses yeux restaient rivés sur l'arme.

Au loin, des cris retentissaient et déjà un groupe de personnes se formait autour du ponton. Parce que le silence s'était effectué dans son esprit, que tous les nuages s'étaient dissipés, Sophia serra la crosse de l'arme. Le coup atteignit Marcello en pleine épaule droite. La violence de l'impact lui fit relâcher le cou d'Eden. Au même moment, Connor McCabe, accompagné de deux autres policiers, sauta dans l'eau et s'interposa entre Marcello et les membres de la famille Capwell.

Eden vacilla et s'évanouit. Channing plongea pour la sauver.

Hôpital de Santa Barbara.

Un moment plus tard, tout le monde se retrouva au service des urgences de l'hôpital de la ville. Channing et Sophia attendaient avec impatience des nouvelles sur l'état de santé de leur fille, alors que dans une pièce voisine, des médecins s'affairaient autour de Marcello. Assise à l'écart, Venise ne cessait de murmurer qu'à cause de Marcello, elle n'avait pas pu venger sa mère et reprendre à Sophia tous les symboles du pouvoir Armonti.

Connor avait essayé en vain d'interroger Channing et Sophia, lorsqu'un des médecins qui s'occupait d'Eden vint les rejoindre pour leur dire qu'ils ne pourraient donner un avis avant le lendemain et qu'ils feraient mieux de se reposer. Channing réussit à convaincre Sophia de partir avec lui à la villa Capwell.

Bibliothèque de Santa Barbara, bureau de Bridget Dobson.

- Tu ne peux vraiment pas faire attention.

Alors que 3 heures du matin sonnaient, Kirk et Gina s'activaient à fouiller le moindre recoin du bureau de Bridget Dobson, à la recherche de tous les documents mentionnant le nom de Franco Parisi. Et Kirk venait de renverser plusieurs cartons posés sur une vieille étagère. Gina essuya la poussière sur son visage.

- Oh, ce n'est pas grave. De toutes façons, je suis certaine qu'elle saura que nous sommes venus.

Tout en continuant de fouiller, Kirk expliquait à Gina que son père n'était pas encore l'homme de loi attitré de Channing au temps où Franco Parisi et Channing Creighton Capwell étaient amis.

Gina se concentra sur ses recherches. Elle venait de trouver un carton qui renfermait de vieilles coupures du Santa Barbara Conscience.

- Là, j'ai peut-être quelque chose.

Effectivement, Gina lui tendit une vieille photo prise dans le parc de la villa Capwell, sur laquelle se tenaient C.C., Franco, Paul Galveston et Pamela Pepperidge. La légende précisait que de ce groupe de quatre jeunes allait être à l'origine d'un nouvel essor pour la ville.

Sur un autre bout de journal, on trouvait une vieille photo d'Eden et de Robert avant qu'ils ne partent pour Las Sirenas.

- Je mettrais ma main à couper que Pamela sait ce qu'il s'est passé... Peut-être même que c'est elle qui a tué Franco ? Après tout, cela ne serait pas la première fois.

- Ton père ne t'a jamais parlé de Franco ?

- Non. Il est devenu vraiment essentiel pour les Capwell peu de temps avant la disparition de Sophia. C'est le départ de Grant vers la côte est qui a précipité les choses.

Gina et Kirk poursuivirent ensuite leurs recherches en silence.

 

Pacific Sud, bureau d'Augusta Lockridge.

Assise sur son bureau, Augusta terminait sa conversation avec son fils, Warren. Ce dernier lui racontait la soirée Armonti. Augusta n'en revenait toujours pas qu'Eden soit revenue. Augusta le harcela pour qu'il obtienne de la part de Ted des informations, mais Warren se refusait à questionner son ami pour en faire un papier.

- Chéri, tu devrais chercher à en savoir plus et en faire un article. Après tout, ce n'est pas la première fois qu'Eden tente de tuer sa mère... Ce qui, ma foi, quand on connaît bien Sophia, est compréhensible...

- Maman ! ! !

- Peut-être que Ted pourrait t'en dire plus... Je serais curieuse de savoir le motif. Qu'Eden veuille tuer sa mère, alors qu'on vient de retrouver le cadavre du père de son amour de jeunesse...

- Maman, il faut que je te laisse. On m'appelle dans la salle de rédaction.

Augusta raccrocha et se reconcentra sur l'avancement des travaux : déjà une aile du bâtiment dédié à la recherche sur la flore de l'océan était opérationnelle.

Tout en réfléchissant, Augusta regarda le lointain et distingua deux cavaliers sur les terres de Pacific Sud. Curieuse, elle sortit, prit sa Mercedes et partit en direction des visiteurs.

Augusta stoppa sa voiture à distance des deux cavaliers. En s'avançant à pied, elle finit par reconnaître Pamela, qui chevauchait en compagnie de Kirk Cranston.

- Ainsi, c'est donc vrai. Il suffit qu'on trouve un cadavre pour que les rapaces soient de sortie !

Pamela arrêta son cheval et lui fit faire demi-tour.

- Ah, voilà la nouvelle reine du bal !

- Et maîtresse des lieux, Pamy. D'ailleurs, je serais curieuse de savoir ce que vous et votre acolyte venez faire sur les terres de Pacific Sud.

- Une balade, Augusta. Une simple balade.

Augusta sortit de ses poches une cigarette, qu'elle s'empressa d'allumer. Au passage, elle remarqua les mains pleines de terre de Pamela et de Kirk.

- Et pourquoi pas aussi un pèlerinage !! Un petit retour aux sources pour la première dame Capwell !! Moi, je pencherais plutôt que vous êtes venue inspecter les restes de votre ancien amant.

- En plus d'être devenue femme d'affaires, vous voudriez nous la jouer façon Angela Lansbury !!  Non, Augusta, vous feriez mieux de rester à votre place et de ne pas oublier que vous n'êtes qu'une Wainwright, rien de plus.

- Aha ahahah aha !! Parce que être miss Pepperidge, c'est mieux ! ! ! Ne me faîtes pas rire, Pamy... Rappelez-moi, vous étiez quoi avant de fréquenter Grant Capwell, une standardiste de bas étage qui n'a pas remporté la finale de Miss Californie ? Vous avez raison, être une Pepperidge, c'est nettement mieux !

Augusta écrasa sa cigarette et partit en direction de sa voiture. Après trois pas, elle se retourna et lança à l'adresse de Pamela Pepperidge Capwell Conrad :

- Si c'est une mallette en métal que vous cherchez, ce n'est plus la peine de vous casser les ongles, elle est en sécurité.

Pamela la regarda s'éloigner.

- Quelle poisse. Je la déteste, cette mégère !!

 

Maison de Mason et Julia Capwell.

Julia terminait de préparer le petit-déjeuner, lorsque Daniel McBride passa la voir pour lui raconter les événements de la soirée dernière. Il venait aussi chercher conseil pour savoir s'il devait poursuivre les démarches d'adoption de C.C.. C'est à ce moment que Bobby Ewing sortit de la salle de bain, une serviette autour de la taille.

- Plutôt bel homme ! !

- Ce n'est pas ce que tu crois, Daniel.

- Julia, arrête, tu n'as pas de compte à me rendre.

Au bout d'un petit moment, Bobby vint rejoindre Daniel et Julia, et prit le café avec eux. Bobby et Daniel engagèrent rapidement la conversation, tandis que Julia s'égarait dans ses pensées. Pour elle, il était clair que le passé reprenait vie dans le présent, dans leur présent. Channing éloignait volontairement certains membres de sa famille de la course à l'héritage, comme il l'avait fait pour Mason et Channing Junior, et Mason, lentement, replongeait dans les griffes de Gina DeMott. Elle gardait encore le souvenir des hésitations de Mason...

- Julia, je suis prêt, on peut retourner voir votre soeur à Pacific Sud.

- Désolé. Mais il va falloir que je passe à la villa Capwell. Daniel, peux-tu accompagner Bobby Ewing auprès de ma soeur ? Et surveille qu'elle ne lui plante pas ses griffes ! !

 

Hôpital de Santa Barbara.

Channing Capwell gara sa Bentley de collection devant les portes de l'hôpital. Il s'empressa de sortir du véhicule, de même que Sophia. Ils avaient passé la nuit ensemble dans l'atrium de la villa, dans le plus grand silence. L'un comme l'autre restaient profondément marqués par le drame de la veille. Sophia, libérée du joug de Marcello Armonti, réalisait l'ampleur de la dépendance qu'il avait tissée entre elle et lui. Elle lui avait servi de pion.

Channing réalisait qu'il n'avait toujours pas fait le deuil de la mort de son fils tant aimé et qu'il n'avait pas, à l'époque, pardonné à Sophia d'avoir tiré sur son héritier. Et aujourd'hui que Marcello l'avait totalement innocentée de ce crime, il sentait qu'un poids venait de quitter son coeur.

Channing et Sophia s'engouffrèrent dans le hall de l'hôpital alors que de nombreux journalistes étaient présents, essayant d'obtenir des informations sur le retour d'Eden. Channing remarqua la présence de Warren; il lui adressa un regard noir.

Un médecin se dirigea vers eux pour leur annoncer la nouvelle de la nuit : Eden Capwell Castillo s'était échappée de l'hôpital au cours de la nuit. Ils ne savaient pas quand elle état sortie de sa chambre; une infirmière avait retrouvé son lit vide vers 4 heures du matin.

Sophia chercha à attraper la main de Channing, mais celui-ci se déroba. Il voulait, comme à son habitude, porter seul le poids de sa peine. Sophia chancela. Channing recula : Eden venait de s'enfuir. Il restait seul, toujours et encore seul.

Ensuite, un autre médecin s'approcha de Sophia pour lui annoncer qu'au cours de la nuit, Brick Wallace était sorti du coma.

- Tu peux aller le rejoindre si, pour toi, il est si important !

Sophia dévisagea Channing. Rarement, il s'était adressé à elle avec autant de rage.

Port de Santa Barbara.

Eden / Lisa arpentait le port depuis plusieurs heures. Alors qu'elle s'était rendue à la machine à café, elle avait entendu des infirmières parler de la macabre découverte dans la propriété des Capwell. Et lorsqu'au cours de la conversation fut prononcé le nom de Parisi, Eden / Lisa pâlit. Son coeur fit un bond dans le passé. Coeur et passé retrouvaient le chemin du présent. Elle retourna dans sa chambre, se rhabilla et partit en direction du port. Il fallait qu'elle trouve un bateau pour Las Sirenas au plus vite. Il fallait qu'elle retrouve Robert au plus vite.

Hôpital de Santa Barbara.

Sophia rejoignit Lionel, Marisa et Jane dans la chambre de Brick. Celui-ci reprenait lentement des forces. Il ne gardait aucun souvenir de l'accident à l'origine de son état. Depuis qu'il avait ouvert les yeux, en la seule présence de Lionel, il n'avait cessé de parler de Channing Junior.

En voyant Sophia, les yeux de Brick se mirent à briller. Il s'agita aussitôt. Il commença à parler, mais l'émotion l'empêchait d'être compréhensible. Lionel, qui avait eu les dernières nouvelles grâce à son fils, commençait à entrevoir un lien entre la résurrection de Brick et le soudain retour d'Eden en ville.

Sophia retrouva les gestes maternels et apaisa les craintes de Brick. Avec amour et patience, elle calma les peurs de son fils et réussit à lui faire, au moins pour un moment, oublier le souvenir de Channing Junior.

Lionel s'approcha de Sophia et la prit dans ses bras. Leur amitié, leur longue amitié, atténua les nombreuses angoisses qui rongeaient Sophia : de Channing Junior à Eden, en passant par Brick et C.C., longue était la liste...

 

Terrain de course du Country Club de Santa Barbara.

C'est sur les gradins du champ de course que Gina avait donné rendez-vous à Mason. Caché derrière un foulard de soie et de larges lunettes de soleil, Gina essayait de convaincre Mason de l'aider à poursuivre Channing Capwell en justice pour la garde de ses enfants.

- Mason, je t'en prie... Il faut que tu m'aides. Il n'a pas le droit de me séparer de mes enfants ! ! Il n'a aucun droit sur eux.

- Pour le moment, je ne peux pas, ce n'est pas possible.

- Mason, je n'ai que toi vers qui me tourner... A nouveau, il se sert de Brandon comme d'une arme... Ce n'est pas humain de lui faire subir cet odieux chantage !

Tout en parlant, Gina posa sa main sur le bras de Mason. Elle laissait le vent jouer avec ses cheveux; sous ses lunettes de soleil, elle battait même des cils.

- Mason, je n'ai que toi. Je n'ai personne d'autre à qui je peux demander de l'aide. Et puis Brandon...

- Je sais, Gina. Je sais...

Mason, pensif, leva les yeux au ciel. Son esprit luttait pour en détourner l'image de Julia et de Samantha. Au fond de lui, Mason avait la certitude que les deux femmes de sa vie pouvaient s'en sortir sans lui : Julia était un roc capable de résister à tout, ou une tornade capable de tout renverser pour ses idéaux; quant à Brandon, il n'avait personne dans sa vie pour l'aider. Des brides de son passé lui revenaient en mémoire : le départ de Pamela, l'arrivée de Sophia, et puis surtout le comportement de C.C. avec Channing Junior... Non, Brandon ne pourrait pas endurer cette souffrance. Non, il ne pouvait pas permettre que Channing recommence avec Brandon ou avec qui que ce soit d'autre.

- Je vais voir ce que je peux faire, Gina.

- Oh merci !

Gina sauta contre lui et plaqua ses lèvres contre les siennes. Et comme Mason ne la repoussait pas, Gina, dans son esprit, commença à s'imaginer que Mason et elle pouvaient retrouver amour et complot...

 

Bureau de Warren Lockridge au Santa Barbara Chronicles.

Installé derrière son bureau, Warren relisait pour la énième fois son article sur les incidents du défilé Armonti.  En dépit des nombreux remaniements, rien n'allait dans son article. De rage, il l'effaça. Il n'arrivait pas à écrire la moindre ligne qui ne finirait pas dans la presse people. Le souvenir d'un même article lui revenait en mémoire. D'ailleurs, il le rechercha sur son PC. Et alors qu'il le relisait, le souvenir des paroles de Cruz lui revenaient en mémoire. Non, il ne pouvait vraiment pas écrire cet article, cela serait trahir son amitié avec Cruz et trahir l'amour de sa femme.

La porte s'ouvrit en grand, laissant entrer B.J.. Elle le regarda se torturer l'esprit encore un moment. Puis elle s'avança vers son mari et le détourna de son travail.

Après un long moment où ils laissèrent parler leur corps et leurs mains, B.J. annonça à Warren qu'elle devait s'absenter un moment pour un article sur le trafic d'art au Guatemala.

- Je pense ne pas être absente plus de deux semaines. Trois au plus.

- Tu vas me manquer...

- Te manquer comment?

- Comment, non. Cela serait plutôt combien.

Lentement mais fermement, Warren attira B.J. contre lui et ils s'embrassèrent avec passion.

 

Atrium de la villa Capwell.

Pamela Pepperidge laissait courir ses doigts sur les piliers de la pièce. Elle essayait de se souvenir de son dernier entretien avec Connor. Avec doigté, elle agissait de son mieux pour guider la police sur la piste du meurtrier de Franco Parisi, et bien sûr ce meurtrier devait être Channing Capwell.

- Mais avant tout, je dois retrouver la mallette de Franco que détient cette garce d'Augusta Lockridge.

En errant dans la pièce, Pamela renversa un plateau avec verres et bouteilles d'alcool.

Alerté par les bruits, Ted arriva dans l'atrium.

- Tiens, voilà le tout dernier petit Capwell...

- Pamela ?

- Pas la peine de mettre l'argenterie sous clé, je ne fais que passer.

Elle prit place dans un des fauteuils en osier.

- Teddy, vient me voir. C'est toi que je voulais voir. J'ai quelque chose à te demander. Pourrais-tu, pour moi, aller chercher chez la sauvage d'à côté, une mallette qu'elle doit planquer sous son lit. Cela ne devrait pas être trop compliqué pour toi.

- Désolé, mais je ne ferai rien pour vous.

- Et il a raison ! !

La voix de C.C. tonna contre la pierre.

- Va-t'en, Pamela, tu n'as rien à faire ici.

Tout en parlant, il tenait fermement Brandon contre lui.

- Tu sais, je t'ai déjà mis à la porte une fois, et cela ne me dérangerait pas de recommencer.

- Fais attention petit, cet homme est un monstre qui aime sucer le sang des enfants, et quand il a fini, il les laisse tomber. Avant c'était un autre qu'il protégeait ainsi. Avant toi, c'était mon fils...

- Tais-toi, vieille folle...

Channing laissa Brandon pour s'approcher de Pamela. La colère l'habitait. Et en plus la haine de savoir qu'elle avait en partie raison.

- Tu sais, petit, tu devrais t'enfuir... Regarde ce que sont devenus ces enfants. Tiens, il n'y a qu'à voir comment a fini Eden... C'est vrai, Channing, peux-tu nous parler de ta dernière rencontre avec la si belle, la si brillante Eden Capwell ?

- Tu vas la fermer ! ! !

Channing se rua sur sa première femme et commença à l'étrangler.

Au même moment, Mason, Gina et Connor franchirent la porte de la villa et découvrirent le terrible spectacle. Appuyé contre un pilier, C.C. tentait de tuer Pamela, alors que Ted faisait de son mieux pour les séparer.

- Je vais te tuer !

- AURGGG ! ! !

- Arrêtez-le, il veut me tuer, comme il a tué Franco...

Connor s'avança.

- Monsieur Capwell, lâchez-là...

Channing finit par desserrer ses mains et abandonna Pamela, qui se laissa glisser le long du pilier.

- Monsieur Capwell, j'ai des questions à vous poser sur la mort de Franco Parisi...

Pendant ce temps-là, Mason se rua vers sa mère, et Gina vers son fils. Le coeur de Gina se remit à battre de bonheur. Elle serrait si fort son fils qu'elle l'empêchait presque de  respirer.

- McCabe, vous devriez l'arrêter, il a quand même essayé de me tuer.

- Maman !

- Arrête, Mason, il est temps que Channing Capwell paye pour chacun de ses crimes. Et vous pouvez me croire, la liste est longue. Channing...

Pamela planta son regard dans les yeux de son ex-mari.

- Channing, si tu veux que je me taise, je veux tout. Tout ce qui aurait dû être à moi. Je ne pense pas que toi et ta famille pourraient supporter tout ce que j'ai à dire...

Channing restait immobile.

- J'attends, Channing. Crois-tu que le clan Capwell pourrait le supporter ?

- ...

- Toujours pas de réponse, chéri...

Pamela s'était redressée et défiait le grand Channing Capwell de toute sa hauteur.

- Je veux tout ce que j'aurais dû avoir il y a des années, l'argent et le pouvoir...

Channing, plus pâle que jamais, restait immobile.

- Nous savons, toi et moi, ce qu'il s'est vraiment passé cette après-midi-là. Nous savons tout jusqu'au nom du coupable ! !

- Très bien. En attendant, je veux que vous sortiez tous de chez de moi. Je veux rester seul avec Brandon. Pamela, je te laisse deux jours pour rédiger avec Mason un document. Je verrai ensuite avec mon avocat ce qu'il y a lieu de faire.

Le verdict venait de tomber. Channing avait parlé.

- Pamela, je ne veux plus jamais te revoir. Si jamais tu remets un pied dans ma maison, je te tue. Car la villa est à moi et restera à moi.

- Pas de problème, Channing. Les avoirs des Entreprises Capwell me suffiront.

Chapitre 32