Eleanor la nouvelle vamp de Santa Barbara | |||||
Par Alena Prime, Télé Star, 1991 |
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C'est l'une des toutes dernières héroïnes de Santa Barbara; elle en est aussi une des plus ravissantes et des plus mystérieuses dans un rôle de vamp au caractère bien trempé ! Dans les épisodes que nous voyons actuellement, elle se fait passer pour un ex-agent du FBI et s'est mise au service de Cruz (A Martinez). «Mon personnage se nomme Elena Nikolas, explique l'actrice. Pour conserver l'incognito, elle se fait appeler Eleanor Norris. Elle est en fait la fille illégitime de C.C. Capwell, et tient sa véritable identité secrète afin de pouvoir évoluer en toute liberté dans la famille et y semer la zizanie. Et elle ne s'en prive pas !» Lorsqu'on lui a proposé le rôle, Sherilyn Wo1ter a été enthousiasmée. «La proposition tombait on ne peut mieux. Depuis trois ans, j'interprétais un personnage mièvre dans un autre feuilleton. En lisant le scénario, j'ai su immédiatement que le rôle me conviendrait. Tout en sachant qu'il y aurait des inconvénients... »
Parmi eux, le courrier. Comme toutes les vedettes, Sherilyn en reçoit des sacs entiers. A cette différence que les enveloppes qui lui sont adressées ne contiennent pas que des gentillesses. «Parmi les lettres d'insultes, il y avait une fois une page toute blanche. Pas un mot écrit. Mais on avait glissé une rose desséchée, affreuse. Cet admirateur ne devait pas me vouloir du bien », plaisante Sherilyn. Souvent, dans les lettres, les téléspectateurs lui demandent d'être plus gentille, et parfois même la menacent de représailles. «C'est très surprenant de voir que le public peut mélanger la réalité et la fiction. L'acteur est détesté parce que son personnage est détestable.»
Parfois, ce courrier peut devenir franchement étrange. L'actrice a un jour reçu une lettre signée d'un prisonnier enfermé dans le tristement célèbre "couloir de la mort", ces enfilades de cellules réservées aux condamnés à la peine capitale. «Il avait paraît-il, vu une photo de moi signée d'un certain photographe que je ne connaissais pas. Et le détenu m'expliquait que ce photographe en question possédait des éléments apportant des preuves nouvelles de son innocence. Il me demandait donc de le mettre en contact avec lui. Je n'ai jamais su s'il s'agissait d'une histoire montée de toutes pièces. Je n'ai jamais pu savoir non plus si ce photographe avait existé. Le prisonnier n'a jamais donné suite. S'il l'avait fait, peut-être aurais-je entrepris des recherches plus poussées.»
«Ma mère était un professeur exigeant en matière de discipline. Lorsqu'elle surprenait un élève à fumer en cachette, elle le punissait sévèrement. Ensuite, c'est naturellement contre moi que les lycéens se vengeaient. Et maman était au moins aussi stricte avec moi. Quand je faisais une bêtise, elle ne me ratait pas. Peut-être est-ce pour cette raison que je suis restée longtemps une adolescente renfermée.» La situation a quand même eu des avantages. D'abord, Sherilyn a fait de bonnes études. Ensuite, c'est en voulant s'extérioriser qu'elle s'est inscrite à des cours de diction et d'art dramatique. A l'époque, elle habitait avec sa mère à Sacramento. «Mes parents se sont séparés lorsque j'avais 3 ans (Sherilyn est née en Virginie, en 1959). Maman a choisi Sacramento par hasard. Elle a regardé sur une carte, y a repéré une région au climat doux, et une ville où elle pourrait trouver du travail.»
Le hasard fait bien les choses. Sacramento n'est pas très éloignée de Hollywood. Et quand, à 20 ans, Sherilyn décide de se lancer dans une carrière de comédienne, c'est dans la capitale du cinéma qu'elle s'installe. «Le plus difficile a été de trouver un impresario, se souvient-elle. Je me suis inscrite à un cours de comédie, et finalement mon professeur m'en a déniché un. Mais c'était une toute petite agence artistique qui ne m'a pas servi à grand-chose.»
Premier coup de pouce du destin : son petit ami de l'époque, assistant-réalisateur, lui demande d'apporter sur le plateau un scénario oublié à leur domicile. En la voyant, le metteur en scène interrompt son travail pour s'exclamer : «Qui êtes-vous ? Vous êtes exactement celle que je cherche !» «Je n'en croyais pas mes oreilles, s'émerveille encore Sherilyn. Bien sûr, ce n'était qu'un tout petit rôle. Mais cela m'a mis le pied à l'étrier. »
Effectivement, elle décroche rapidement un rôle dans une série intitulée B.J. and the Bears qui a duré plusieurs saisons. Ensuite, on l'engage pour un feuilleton de la journée, jusqu'au jour où les producteurs de Santa Barbara l'appellent. «Un des scénaristes du feuilleton pour lequel je travaillais venait d'être engagé pour Santa Barbara. Il m'a recommandée pour un rôle qu'il avait spécialement écrit pour moi.» Ce sera Eleanor-Elena. A l'écouter, la vie de Sherilyn Wolter est faite de ces petits clins d'oeil du destin qui peuvent bouleverser une existence. La façon dont elle a rencontré son compagnon Sam Hennings, est tout aussi cocasse. A l'époque, elle jouait dans Hôpital Central, un monument de la télévision américaine. De repos pendant deux jours, Sherilyn avait donc légitimement déserté le plateau. La veille de son retour, elle fit cependant un détour par sa loge, afin d'y passer un coup de téléphone personnel. En poussant la porte, elle eut la surprise de découvrir un grand gaillard (1,87 m) portant un uniforme de policier.
«Je ne sais pas lequel de nous deux était le plus étonné. Bien sûr, Sam ne savait pas que la loge m'était réservée. Et moi, je ne comprenais pas ce qu'il faisait là. J'ai appelé l'assistant-réalisateur pour lui demander des comptes. Il m'a alors expliqué que Sam n'ayant que deux jours de tournage, et moi étant absente ces deux mêmes jours, on lui avait attribué ma loge. Personne ne s'attendait à ce que j'y vienne pour téléphoner.» Sherilyn, en colère, trouve le procédé cavalier : pour un comédien, une loge est comme un petit chez-soi. On y entrepose toutes ses affaires personnelles, et on n'a évidemment pas envie d'y voir un inconnu ! Même si ce n'était pas sa faute, Sam se sentait coupable.
Malgré toute leur complicité, il y a une passion que les deux acteurs ne partagent pas : l'alpinisme. Car Sherilyn est une fan d'escalade. «Il n'y a pas longtemps, j'ai grimpé avec deux amies au sommet du mont Whitney, le point culminant des Etats-Unis, à 4418 mètres d'altitude. C'était une expérience exaltante. Là-haut, l'oxygène devient rare, mais la vue est imprenable. L'impression de victoire est telle que l'on a vraiment l'envie de planter un drapeau et d'écrire dessus : "Sherilyn est montée ici en 1991." J'ai ressenti la même sensation le jour où j'ai sauté pour la première fois en parachute.» Car la jeune femme n'hésite pas à prendre des risques. «Je ne sais pas très bien pourquoi j'ai osé. Sans doute parce que j'avais été blessée dans mon amour-propre par des garçons qui m'en parlaient toujours comme d'un sport réservé aux hommes. Alors j'ai dû leur dire quelque chose comme : «Eh ! Attendez un peu… Vous croyez que j'aurai peur parce que je suis une femme ? Je veux y aller aussi.» Evidemment, une fois dans le ciel, plus question de faire marche arrière... La première partie de la descente, en chute libre, est terrifiante. Mais ensuite, tout s'est bien passé. Mais ma mère m'a supplié de ne jamais recommencer.»
Sherilyn est restée proche de sa mère (qui vit toujours à Sacramento) ainsi que de son père, avec qui elle a renoué des liens plus-filiaux. Elle ne l'a revu qu'à l'âge de 18 ans. Mais depuis, ils se rencontrent régulièrement. «Enfant, je suppose que je lui en voulais un peu de s'être séparé de ma mère, explique la jeune femme, même si ce n'était pas entièrement sa faute. Je crois que je n'ai pas accepté qu'il se remarie et fasse un enfant avec une autre femme.» (Sherilyn a un demi-frère, Randy.) «Adolescente, poursuit-elle, je ne voulais plus entendre parler de lui. Il faut dire que j'étais en plein âge ingrat. Adulte, j'ai vu les choses sous un angle différent. Je me souviens qu'un jour, je lui ai tout simplement téléphoné pour lui demander si je pouvais passer le week-end avec lui. Il a accepté. La glace était rompue.»
M. Wolter est un gentleman, très distingué, aux cheveux blancs. Il exerce le métier de psychologue. Sherilyn n'hésite pas à lui confier ses problèmes... qui, ces derniers temps, s'accumulent. On lui a proposé un rôle dans Amour, Gloire et Beauté (Top Models), une offre qui n'a finalement pas abouti. Au même moment, elle s'est brisé la cheville et a dû être plâtrée. Enfin, elle apprenait que sa chienne de 12 ans était victime d'une tumeur au cerveau. Malgré sa forte personnalité, Sherilyn en a beaucoup souffert. «Perdre un compagnon de 12 ans, c'est comme voir disparaître un membre de la famille.» Elle a servi d'infirmière à l'animal, le veillant chaque nuit. «Elle faisait peine à voir», soupire-t-elle. Pour atténuer la peine causée par cette longue agonie, Sam lui offre un chiot baptisé Travis, le nom du personnage qu'il interprète dans le film Shout (avec John Travolta). «Cela partait d'une bonne intention, reconnaît Sherilyn. Malheureusement, cela m'a surtout compliqué la vie. Le chiot courait et faisait pipi tout le temps, en choisissant les coins de la maison les plus difficiles à nettoyer. Avec le pied dans le plâtre, et ma vieille chienne à soigner, je n'avais pas besoin de ce petit démon qui n'en ratait pas une. Mais j'ai été heureuse de l'avoir quand ma chienne est partie.» A l'époque, Sherilyn ne travaillait pas. Ce qui lui a laissé le temps de réparer les dégâts. «Quand on tourne, on est loin de chez soi du matin au soir, et les journées sont longues. La seule occupation possible, c'est de penser à son personnage. Et franchement, je me demande jusqu'où ira Eleanor…»