Portrait : Lenore Kasdorf | |||||
Par Michael Logan, Soap Opera Digest, 1987 |
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Une starlette hollywoodienne moyenne devrait fumer des douzaine de Havanes, ingurgiter une sacrée dose de purée de pommes de terre et veiller au moins 48 heures pour obtenir une voix aussi rauque que celle de Lenore Kasdorf, mais la sienne est d'origine. Cependant si au téléphone elle est régulièrement prise pour une femme de 55 ans ou même un homme, sa voix est ridiculement sexy, beaucoup plus profonde qu'elle ne paraît à la télévision, et c'est aussi ce qui lui ramène pas mal d'argent. Quand cette nouvelle venue est arrivée pour la première fois à Tinseltown, elle a aussitôt obtenu son premier rôle alors que beaucoup d'autres à la tête et à la voix moins chargées attendaient leur tour. Evidemment, il y avait un piège. «J'étais toujours engagée pour des rôles de prostituée,» raconte Lenore, «Mais au moins j'étais la gentille prostituée – celle avec le coeur d'or, qui veut sortir du milieu.» De temps en temps, un macho perspicace du show biz pourrait entendrait son rire tonitruant et reconnaîtrait ainsi sa véritable versatilité. Lenore ajoute : «Ce serait pour le jour où on voudrait me faire jouer une strip-teaseuse qui veut s'en sortir !»
Bien qu'il y ait eu plusieurs rôles de gentilles filles entre-temps, Lenore effectue un retour aux sources avec le personnage de la belle du sud Caroline Wilson, dans Santa Barbara. Telle un magnolia en fleur plongé dans le cuivre, elle a couché avec tous les types qui ont tenté leur chance. Elle est arrivée à Santa Barbara pour régler ses différends avec sa fille Jane et pour récupérer son autre fille Alice, qu'elle a abandonnée il y a des années de cela. C'est l'une des raisons pour lesquelles Lenore Kasdorf a failli ne pas accepter le rôle. «Je n'étais pas vraiment enclin à jouer un personnage qui avait deux filles déjà âgées,» dit-elle en éclatant de rire. «Je ne fais habituellement pas mon âge.» Elle n'était également pas chaude au sujet de rejouer dans un autre soap, ayant travaillé durement pendant plusieurs années pour Haine et Passions et ayant presque échappé à un châtiment similaire avec Des Jours et des Vies.
Ce n'est pas qu'elle soit opposée à travailler dans un daytime soap, mais l'actrice a appris de l'expérience que cela peut s'avérer semblable à un aller simple vers la Sibérie. «J'ai quitté Los Angeles et une jolie carrière sans problème pour jouer dans Haine et Passions à New York,» se remémore Lenore Kasdorf. «Six années après, je revenais et les directeurs de casting me disaient : "Oh, mon Dieu ! Je pensais que vous aviez pris votre retraite !" Ces personnes ne restent pas assises à la maison à regarder des soaps la journée. Ils pensaient que j'avais disparu de la surface de la Terre. Je n'ai pas voulu que cela se reproduise.»
Jusqu'à ce qu'un jour fatidique, sur un avion à destination de Frisco, Lenore Kasdorf se heurte à Jerome et Bridget Dobson, les auteurs qui avaient créé son rôle interminable de l'angoissée Rita Stapleton dans Haine et Passions. Ils semblaient harassés et anxieux (et pour cause – en tant que producteurs, ils étaient juste sur le point de lancer Santa Barbara) mais ont été enchantés de mettre la main sur Lenore. «Ils m'ont demandé : "Vous aimeriez faire un autre soap ?" et j'ai dit : "Noooooooon," et ils ont relevé la tête de leurs genoux recouverts de papiers, de scripts et de mallettes et dit : "Nous ouiiiiiii !"» Les Dobson, qui ne prennent jamais un non pour une réponse, ont continué à faire des propositions tous les six mois ou presque, juste au cas où Lenore Kasdorf changerait d'avis. Leur insistance a payé. «Après un moment, j'ai commencé à devenir lasse,» reconnaît Lenore. «Entre deux télés, j'avais fait le tour de ce qu'il y avait à faire à la maison. J'en avais assez de mon jardin, je détestais mes fleurs, mes placards étaient tous rangés. J'étais prête à les vider et à tout recommencer. Il y avait trois exemplaires de tout chez moi. Ma meilleure amie est entrée et a dit : "Cela ressemble à House Beautiful (La Maison de Valérie américaine). Quel est ton problème ?"»
Après son départ de New York, et la fin de son mariage avec l'acteur Phil Peters, Lenore s'est installée dans la banlieue de San Fernando Valley avec sa fille âgée de sept ans, Vanessa. «J'étais pressée de la sortir de Manhattan,» explique Lenore Kasdorf. «Partout où nous sommes allées, c'était comme un tuyau d'échappement. L'emmener à Central Park une fois par jour pour qu'elle vive comme une enfant normale était devenu le travail de ma vie.» Vanessa a apparemment appris quelques tactiques pour s'assurer que Lenore Kasdorf rentre à la maison tout droit depuis l'école, enfin le travail. «Je ne suis pas vraiment célibataire,» s'amuse Lenore. «J'ai une fille ! Si je sors dîner avec un ami, je m'ouvre à un grand problème. La nuit dernière je suis allée boire un verre après le travail, quelque chose que je ne fais jamais. Mais, je ne pouvais pas lui dire cela. Je l'ai appelée et lui ai dit : "Chérie, je vais travailler un plus peu tard que prévu." Je veux dire, j'étais dehors depuis 45 minutes et je culpabilisais. Et puis, de ce fait, elle s'est couchée tard et elle était grognon le lendemain. Ca n'en valait pas la peine !»
Pour être honnête, ce n'est pas tant que Vanessa soit un tyran que Lenore Kasdorf est réticente à jouer les célibataires. «Je pense que j'ai eu ma dose de rendez-vous hollywoodiens quand j'étais plus jeune,» dit-elle. «Je suis sortie avec ma part de types du genre à s'écrier : "Hé, les gars, regardez-moi ! Je suis avec une star, et jeune en plus !". A présent, les gens que je fréquente sont des amis ou des gens que je rencontre grâce à des amis. Je ne connais personne avec qui je voudrais me marier. Il y a des périodes où je pense : "Il faut que je sorte. Je ne rencontrerai pas de gens si je ne sors pas. Je sortirai avec la prochaine personne qui me le demandera." Alors je m'accomplis, et pendant la moitié de la soirée je me dis à moi-même : "Bon sang, je pourrais être à la maison à lire un livre."»
Bien que son mariage avec Peters ait duré cinq ans, elle ne le considère pas un échec. «Nous étions amis avant cela et nous sommes toujours amis maintenant. Phil et moi serons liés jusqu'à ce que nous mourrons tous les deux. Même si ça a été la chose la plus dure que j'ai vécue dans ma vie, il ne pourrait pas en être autrement parce que Vanessa n'aurait pas existé - et je sait que cette petite puce était destinée à vivre avec moi. Elle est tellement parfaite et tellement belle.» Quant à une nouvelle tentative de mariage ? Kasdorf philosophe : «Le mariage est une si belle idée mais vous avez intérêt à avoir une maison avec des ailes est et ouest.» Peut-être son plus grand défi, cependant, est de convaincre sa petite puce de rester en dehors du show business. Lenore s'exclame : «Je lui dis qu'on attendait d'elle de devenir docteur,» mais le chérubin a clairement d'autres intentions. La maman raconte : «Vanessa a vu ma tête écrasée contre une porte en fer dans Arabesque, elle m'a vu noyée sous la douche dans un pilote pour la télévision, et elle a vu un plafond tomber et me tuer dans Clair de Lune.» Mais le bébé Kasdorf veut-il devenir une star ? Réponse de Lenore : «Non, ce qu'elle veut vraiment faire est diriger.»
Née d'un militaire en poste dans le Queens à New York, cette star brune aux reflets roux a voyagé jusqu'en Thaïlande pendant son adolescence. Son parcours chaotique lui a appris l'adaptabilité. «Les choses peuvent s'effondrer autour de moi, je ramasserai juste les morceaux et continuerai à aller de l'avant,» précise-t-elle. «Il n'y a que très peu de choses que vous pouvez jeter sur ma route dont je ne pourrai me débarrasser.»
L'une de ces choses, apparemment, a été son rôle du chirurgien accablé Veronica Kimball, plus ou moins invisible, dans Des Jours et des Vies. Les producteurs exécutifs l'ont engagée dans le soap en 1983, espérant qu'elle flirterait telle une briseuse de ménage et détruirait le mariage ultra-populaire de Neil et de Liz Curtis (Joe Gallison et Gloria Loring). En fait, ils voulaient lui faire mettre le grapin sur tout ce qui portait un pantalon. Soudainement, on a laissé tomber Kasdorf comme une paire de chaussettes. Rétrospectivement, l'expérience semble si terrible que l'actrice ne la mentionne même pas dans sa biographie officielle. «Pensez-vous qu'ils me détestaient ?» s'interroge-t-elle, «Je n'ai jamais posé la question.» Une fois, Lenore était présente pour tourner quatre épisodes, pendant lesquels elle a dormi. «Un jour, je me suis endormie à trois reprises dans ma loge», se rappelle-t-elle. «Ce n'était pas parce que les gens étaient ennuyeux – J'étais tellement stressée. Je pense que je ne voulais pas être là. Je sais que quand je m'endors lors d'une série, quelque chose ne va pas. Je n'étais pas heureuse. Personne ne s'est présenté à moi. Personne ne m'a dit où aller. Quelqu'un est descendu pour me donner des notes après les essayages de costumes et je n'ai pas su s'il était le producteur, le réalisateur ou le concierge, j'étais comme ravie que rien ne sorte de tout ça.»
Naturellement, elle était un peu hésitante à signer pour Santa Barbara. «Après l'expérience de Des Jours et des Vies, je n'ai pas voulu y aller sans garanties. C'est un peu comme une mariage. Vous avez intérêt à être aussi positive et sûre de vous que vous pouvez l'être avant de vous lancer - ou tôt ou tard ça va se voir. Vous commencez à vous détester. Vous devenez déprimée. Ainsi j'ai voulu m'assurer que j'avais annihilé tous mes doutes avant de m'engager. Et maintenant, je suis enchantée.». En fait, elle ne commence jamais une scène avec le séduisant Nick Coster (Lionel Lockridge) sans que son coeur ne s'emballe. Mais ne pensez pas qu'il y ait anguille sous roche dans les coulisses. Comme le précise l'actrice : «Nicolas a cette habitude de dégager sa gorge juste avant que la caméra tourne. Il fait quelque chose comme "HAAAAHHHHHH-RAAAAAHHHHH-RUHHHHH !!!!!" Chaque fois qu'il le fait, je sursaute.»