Pas si folle que ça

 Par Janet Di Lauro, Soap Opera Weekly, 1990

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Le jour où Christopher Norris a été recrutée dans le rôle de la gentille fille appartient au passé ! Après son passage de plus d'un an dans le rôle de la vile Laura Asher dans Santa Barbara et son évolution en une magnifique psychopathe, l'industrie (télévisuelle) est certaine de regarder l'actrice avec le teint clair et les joues rosées sous un jour nouveau. «Les gens regardent toujours mon visage et disent : "Allons... ce visage ne peut pas être le visage d'une mauvaise fille"», dit Norris. «Une pom-pom girl qui a un peu mal agit, mais certainement pas méchante.»

Norris remarque qu'avant d'arriver dans Santa Barbara, il n'y a eu qu'une seule autre fois où elle a déjà eu à jouer quelqu'un de vaguement tortueux. «Quand j'avais 10 ou 11 ans, j'ai fait un spectacle à Broadway intitulé Roar Like a Dove», se souvient-elle. "Il y avait Betsy Palmer. Elle jouait ma mère. Je jouais sa vilaine fille. Je n'étais pas comme une mauvaise graine ou quoique ce soit, juste sérieusement précoce. Ca a été la seule autre fois dans ma carrière où j'ai vraiment eu à jouer quelqu'un de méchant.»

Mais quand les scénaristes de Santa Barbara l'ont mise devant ce défi à nouveau, Norris a sauté sur l'occasion. En fait, ces jours-ci, elle est devenue maître dans l'art de jouer le M-A-L ! «C'est vraiment comme un tour sur le grand-huit», dit-elle, «et si gratifiant en tant qu'actrice. Tous les deux mois, j'ai été face à un tout nouveau challenge, une chance différente d'être créative. Ca a juste été du délire. J'ai eu à jouer tant de choses si différentes - me confronter à un problème d'alcool, jouer saoule - ce qui est quelque chose que je n'avais jamais connu dans ma vie, (jouer) tout ce truc de maniaco-dépressive que Laura est en, train de traverser en ce moment-même... Je n'avais jamais rien fait de cela. C'est tellement de plaisir.»

«Généralement, les gens dans le show-business n'ont pas tendance à penser aux soaps comme étant particulièrement gratifiants parce qu'il y a peu de temps pour faire du travail en profondeur», continue Norris. «Mais avec mon personnage et avec ce que j'ai expérimenté, c'est génial. C'est un apprentissage génial et un exercice de développement pour moi. Je me sens beaucoup plus en confiance en tant qu'actrice.»

Comme le rôle de Laura marque le premier essai de Norris à incarner un personnage qui est aussi hors de toutes limites, elle s'inquiète parfois de prendre les choses de manière trop grossière. «Dans certaines scènes où je suis vraiment tordue, c'est très difficile pour moi d'avoir une sorte de regard dessus. C'est si différent de tout ce que j'ai déjà fait que je n'ai rien auquel me comparer», remarque-t-elle. «Je n'ai jamais joué de personne folle avant. Donc parfois je me demande : "Ne vais-je pas vraiment trop loin ? Est-ce que je ne gâche pas simplement le décor ?" A certains moments, Laura m'effraie. Il y a parfois une scène qui à l'occasion me dérange. Je vais faire un tour en pensant "Waouh ! Cette fille est en mauvaise posture".»

De manière surprenante, l'actrice ne voit pas Laura comme une fille totalement mauvaise. «C'est probablement juste un sujet de discussion d'acteur, mais je ne pense pas qu'elle soit mauvaise à la base», dit-elle. «Tant de choses si horribles sont arrivées à Laura durant sa vie et au long de l'année passée qu'elle a simplement perdu (la tête). A la base, je pense que Laura est une femme très bien comme il faut. Une de mes amies est psychiatre à New York», explique-t-elle. «Elle a récemment pris des vacances en Floride, et a eu la possibilité de regarder la série. Elle m'a appelée la semaine dernière et m'a dit : "Il est tout à fait évident pour moi que Laura est maniaco-dépressive. Si elle prenait un traitement, elle irait bien. Elle se normaliserait dans l'instant." Le seul problème est que Laura ne prend pas ses médicaments. Elle les donne à Annie.»

L'introduction de l'actrice Sharonlee McLean dans le rôle d'Annie (la voisine de chambre de Laura à l'hôpital psychiatrique) a apporté le parfait complément au personnage de Norris. «Elle est sensationnelle», se vante Norris, «une actrice géniale et géniale avec qui travailler. Ils nous appellent les Laverne et Shirley de Santa Barbara, parce que nos scènes sont tellement amusantes. Vous savez si vous faites du bon boulot si dans le champ des caméras, l'équipe s'approche et vous regarde travailler», continue Norris. «Sharonlee et moi avons un public chaque matin pour chacune de nos scènes. Tout le monde rit et applaudit. Nous sommes un vrai couple de cinglées.»

«J'ai lu une interview de Michael Caine récemment», remarque-t-elle. «Il faisait la promotion de son nouveau film dans lequel il joue un tueur dérangé mentalement. Dedans il dit que tous les acteurs font de bons fous... C'est dans leur nature. Je pense que tous les acteurs recherchent à faire quelque chose comme cela où ils peuvent vraiment se dépasser. Il appartient vraiment à l'acteur de décider jusqu'où aller. C'est une grande liberté que d'être sans peur.»

Et Norris a pris cette liberté à fond, pour le plus grand plaisir des fans. «J'ai remarqué que les gens sont vraiment entrés dedans. Ils s'y sont impliqués pour certaines raisons. Des fans viennent vers moi avec un air excité sur le visage et me disent : "Quand vous avez fait ça, j'étais trop pressé que ça arrive." C'est quelque chose que je n'avais jamais expérimenté auparavant avec un personnage.»

Est-ce que l'actrice a déjà feuilleté des scénarios pour savoir quels rebondissements outranciers sont à venir au programme de Laura ? Est-elle anxieuse de s'y atteler ? «Oui aux deux questions», sourit-elle. «Mais parfois ça fout la frousse, comme quand j'ai tué Leo Mitchell l'été dernier. C'était effrayant. J'ai dû jouer de mon imagination et penser à ce que ça doit être de tuer un autre être humain.» Bien sûr, depuis cela, Laura a fait sa seconde victime - Sasha Schmidt. «Je suis une pro là-dedans maintenant, donc ça s'est fait d'un coup», plaisante-t-elle. «En réalité, ça n'a pas été la même chose avec Sasha. Je ne voulais pas la tuer. Il pleuvait; il faisait sombre; j'avais du mascara dans les yeux et j'étais folle. Ca a été une chose totalement différente.»

Est-ce que Norris s'est déjà inquiétée de sa longévité dans la série ? «Après que j'aie tué Leo, j'ai pensé que c'était la fin», dit-elle. «Mais c'était il y a neuf mois. Donc, qui sait ? Je me suis sentie mal quand j'ai appris que j'étais sur le point d'abattre Sasha», admet Norris. «Je l'ai découvert quelques semaines avant (que cela arrive) et je n'ai pas arrêté de dire à tout le monde : "S'il vous plait, ne le dites pas à Michelle (NiCastro, qui interprète Sasha)." Puis, j'ai commencé à plaisanter au sujet de comment j'allais devenir l'actrice la plus impopulaire sur le plateau, que tout le monde allait regarder la feuille de présence et dire : "Oh non : J'ai une scène avec Laura aujourd'hui".»

Le seul sujet de plainte que Norris a eu au sujet de sa récente intrigue a été la progression du plan de Laura pour tuer son mari, Ethan (Leigh McCloskey). «La manière dont tout cela a commencé m'a beaucoup plu. Laura a dit dans une scène avec Ethan : "Je me sentirais bien si tu m'accordais simplement le divorce et sortais de ma vie." Mais Ethan ne le fera pas», explique Norris. «Comme Ethan ne lui accordera pas le divorce, Laura a senti qu'elle devait se débarrasser de lui. Mais ces deux derniers mois, les choses sont devenues si alambiquées que je ne sais pas si le public se souviens de pourquoi elle essaie de le tuer. Ce n'est vraiment pas une histoire de vengeance. C'est pour essayer de survivre. Laura pense que la seule façon pour elle de survivre est de se débarrasser d'Ethan.»

Avec tous les rebondissements de son intrigue, on ne se demande pas pourquoi Norris ne peut souvent pas attendre pour rentrer chez elle et partager sa journée pleine d'action sur Santa Barbara avec son mari, l'homme d'affaires Walter Danley. «Toutes les fois où j'ai eu une journée particulièrement gratifiante, je dis à mon mari : "Ca ne t'embêtes pas si nous discutons du travail pendant quelques heures ?" Et je lui remplis la tête avec ce que j'ai fait ce jour-là. Il est en permanence stupéfait.»

Après cela, elle met Laura Asher au repos et se lance dans le travail d'être Christopher Norris. Au premier coup d'oeil, Norris semble être l'incarnation de la fille toute simple, mais elle ne prétend pas du tout être de ce genre. «Je ne suis pas du type aussi doux que l'était Gloria Brancusi dans Trapper John,» remarque-t-elle, au sujet de la série dans laquelle elle a été pendant six ans. «Je suis bien plus une pragmatique, que je l'admette ou non. Je suis une femme d'affaires. Franchement, si j'avais à me répertorier, je fais beaucoup d'affaires mes jours de repos. Je suis fascinée par ce genre de travail. Je pense que je possède le meilleur des deux mondes en cela que je peux utiliser ceci et aussi utiliser ma créativité dans mon jeu.»

Et Norris est pleine de créativité. Elle fait de la décoration à la fois intérieure et extérieure pour sa maison à flanc de coteau qu'elle partage avec son mari et leurs golden retrievers, Sundance et Annie, et leur chat Ping («Il y avait Ping et Pong mais, malheureusement, Pong n'est plus avec nous.»). Norris et Danley ont acheté le terrain et construit la maison de leurs rêves à partir de zéro - un processus qui a pris quatre ans. «Je suis ravie de la façon dont les choses ont tourné. C'est un autre accomplissement, quelque chose que je peux toujours faire en dehors de la comédie», dit-elle. «J'ai choisi les couleurs, les carreaux de la salle de bains, les éléments de fixation, les bois d'ébénisterie...» Norris s'extasie devant sa gigantesque cuisine, qu'elle a équipé avec une cuisinière de professionnel. «J'ai beaucoup de plaisir à m'y atteler. Personne n'aime préparer à dîner tous les jours... mais quand vous avez un joli espace autour de vous, cela aide votre créativité.»

Alors que la vie de Norris est très remplie en dehors des murs des bâtiments de Santa Barbara, elle préfère un entremêlement de toutes ses facettes - actrice, épouse et femme d'affaires. En fait, elle admet volontiers qu'elle n'est heureuse qu'en travaillant. Et Laura la rend en effet très heureuse. «Absolument», sourit-elle. «Je m'amuse comme une folle. Et mon mari est heureux quand je suis heureuse. Il m'est d'un grand soutien, merci mon Dieu. Avec le genre d'horaires que vous avez dans les daytime soaps, c'est simplement exténuant. Je suis très très chanceuse d'avoir un mari qui me comprend et à l'occasion me prépare à dîner quand je rentre à la maison. Je suis une fille très chanceuse.»